Que dire du comportement des individus au sein de la société ? Comment expliquer que nous nous faisons grâce aux autres en ayant des ambitions personnelles ? Un peloton est-il une forme de société ?
Dans la recherche, il est bien souvent préférable de prendre de la hauteur. Étudier le comportement humain par la seule société est impossible. Il faut isoler les sujets, passer du macrocosme à un microcosme.
Après Socrate à vélo, Guillaume Martin publie un nouvel essai en novembre 2021, La société du Peloton. Le cycliste de la Cofidis s’intéresse aux comportements humains du cycliste et nous propose une analyse de notre propre société par le prisme d’un peloton.
Guillaume Martin, philosophie et vélosophe
Diplômé d’un Master en philosophie à l’université de Paris-Nanterre en 2015, Guillaume Martin n’est pas à son coup d’essai. En 2019 puis en 2020, le normand publie successivement une pièce de théâtre Platon vs Platoche, éditions l’Harmattan puis Socrate à vélo, éditions Grasset.
Versé dans la philosophie par les réflexions des philosophes Alain et Nietzsche, Guillaume Martin occupe une place particulière au sein du peloton professionnel. Celle du vélosophe, le cycliste qui pense par le vélo. Bien que la définition soit quelque peu large et inclut aussi une dimension politique, l’appartenance de Guillaume Martin à la caste des philosophes n’est pas à renier ou à remettre en cause.
La proximité du coureur avec le monde de la philosophie n’est pas incompatible. Ses résultats encourageants sur les Grands Tours en témoignent. À travers La Société du peloton, philosophie de l’individu au sein d’un groupe, le coureur nous dévoile sa personnalité et son rapport au peloton. Il observe ses coéquipiers, ses adversaires, l’ensemble de la caravane et du staff.
Lorsque le peloton mime notre société
À travers son livre, l’auteur tend à nous démontrer que le peloton est le paradigme de notre société. Il est souvent bien plus simple d’étudier un microcosme qu’un macrocosme. C’est ce que s’applique à faire Guillaume Martin à travers cet essai, analyser les comportements humains au sein d’une communauté.
La lecture de l’essai se fait simplement. Il n’y a aucun besoin d’être un féru de philosophie pour comprendre les concepts mis en place tant Guillaume Martin est didactique dans son écriture.
Philosophie de l’individu au sein d’un groupe, l’intérêt prime sur le collectif
En tant que sport individuel, le cycliste est un paradoxe en soi car la participation des autres est nécessaire. C’est avec cette idée en tête que le philosophe nous démontre que nous privilégions notre propre intérêt avant celui du collectif.
“On sait tous qu’il faut collaborer mais chacun privilégie ses intérêts personnels”
Ainsi, le parallèle est fait avec notre société et les situations que nous traversons. L’urgence climatique est un des exemples probants. Quand chacun pourrait faire un effort, on attend des autres qu’ils le fassent avant nous. Au sein d’une échappée, devons-nous collaborer à l’effort et aller au bout ? Ou attendre des autres qu’ils le fassent et en free-rider profiter de l’émulation collective ?
Il est question de la place de l’homme dans un peloton, de l’équipier et de sa relation avec son leader. Du salarié face à l’entreprise. Doit-on se donner corps et âme pour qu’un autre soit couronné au dépend de sa propre condition ?
Toutes ces questions sociétales prennent place au sein d’un peloton mais aussi au sein de notre société. L’auteur cherche à y apporter lumières et réponses sans pour autant tomber dans la moralisation.

Maximiser son profit au sein d’un peloton
L’auteur perçoit chez le cycliste comme chez le citoyen une certaine forme d’égoïsme. Nous souhaitons tous réussir au sein d’un groupe. C’est normal. Il ne dénonce nullement cela et le démontre même à travers son livre. Réussir, c’est souvent grâce aux autres.
“Le groupe est indispensable à l’individu. Pourtant, quand ce dernier brille, on oublie souvent que c’est grâce à d’autres”.
Ainsi, Guillaume Martin nous délivre un essai aussi personnel que critique sur les comportements humains. Néanmoins, l’auteur est persuadé que l’individualisme peut s’exprimer dans un espace où l’intérêt collectif doit primer avant un celui de l’individu.
J’aurai pu continuer à vous parler des différentes images cyclistes et des concepts politiques et économiques que l’auteur met en place, mais cela vous couperait la découverte. Je vous recommande la lecture de cet essai afin de réfléchir un peu plus à notre rapport au monde et aux autres.
Informations techniques
- Titre complet : La société du peloton, Philosophie de l’individu dans le groupe
- Auteur : Guillaume Martin
- Editeur : Grasset
- Nombre de pages : 186
- ISBN : 978-2-246-82688-0
- Date de publication : 10/10/2021
- Prix TTC : 17,90 €